Tout reste
Jean-François Corbet

En pointillé je suis à moi même. Le temps s’allonge en heures lascives et cruelles.
Je suis.
L’arbre ne se soucie pas de la feuille de l’automne, la feuille ne sait pas qu’il est bien tard.
Comment peut-on créer la vie et chérir ses enfants si l’été n’attend pas ? Si l’hiver frappe à mes tempes ? 
Fourmis de la terre, étoiles du ciel. L’innombrable. 
Monsieur de la Fontaine ne savait pas ? 
Tu pars, ils partent, je disparais un peu plus à chaque instant. 
Les pas de mon grand-père dans ceux de son père. Les pas de mon père dans ceux de son père. Mes pas dans ceux de mon père. 
En mon cœur, la caravane des sombres colères n’est déjà presque plus. Point d’arrêt à l’invisible qui renait en toi mon fils. Déjà il t’a pris. Comme je regrette ce geste par lequel j’ai gravé la marque à ton front. 
Le temps va. 
Tout reste.